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Simenon, Georges - La danseuse du Gai-Moulin

Читать бесплатно Simenon, Georges - La danseuse du Gai-Moulin. Жанр: Полицейский детектив издательство неизвестно, год 2004. Так же читаем полные версии (весь текст) онлайн без регистрации и SMS на сайте kniga-online.club или прочесть краткое содержание, предисловие (аннотацию), описание и ознакомиться с отзывами (комментариями) о произведении.
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— Il y a longtemps que vous le connaissez ?

— Peut-être trois mois… Depuis qu’il vient presque tous les jours au Gai-Moulin avec cet oiseau-ci… Des purés, d’ailleurs ! J’aurais mieux fait de me méfier… Mais vous savez comment ça va… Ils sont jeunes !… Ça repose d’aller faire une parlote avec eux… Je les traitais en copains, quoi !… Et, quand ils m’offraient un verre, j’avais encore soin de ne pas prendre quelque chose de trop cher…

Elle avait le regard dur.

— Vous avez été leur maîtresse à tous les deux ?

Elle pouffa.

— Même pas !… C’est sans doute ce qu’ils voulaient… Mais ils tournaient autour du pot sans oser se déclarer… Ils venaient chez moi, séparément, sous des prétextes, pour me voir m’habiller…

— Le soir du crime, vous avez bu du champagne avec Graphopoulos. Est-ce qu’il était convenu que vous le suivriez après la soirée ?

— Pour qui me prenez-vous ?… Je suis danseuse…

— Entraîneuse, plus exactement… On sait ce que cela veut dire… Vous êtes partie avec lui ?

— Non !

— Il vous a fait des propositions ?

— Oui et non. Il m’a parlé d’aller le retrouver à son hôtel, je ne sais même plus où. Je n’ai pas fait attention…

— Vous n’êtes pas sortie seule.

— C’est exact. Au moment où j’atteignais le seuil, un autre client, que je ne connais pas, et qui doit être Français, m’a demandé où se trouve la place Saint-Lambert. Je lui ai dit que j’allais de ce côté. Il m’a accompagnée un bout de chemin, puis soudain il m’a déclaré :

« Bon ! j’ai oublié mon tabac au bar… » Et il a fait demi-tour…

— Un homme de forte corpulence ?

— C’est cela !

— Vous êtes rentrée directement chez vous ?

— Comme chaque nuit.

— Et vous avez appris le crime le lendemain par les journaux ?

— Ce jeune homme était chez moi… C’est lui qui m’a dit…

Deux ou trois fois déjà, Chabot avait voulu intervenir, mais le commissaire le calmait d’un regard. Quant au père, il était toujours debout à la même place.

— Vous n’avez pas la moindre idée sur cet assassinat ?

Elle ne répondit pas tout de suite.

— Parlez ! Chabot vient d’avouer que ce soir-là, en compagnie de son ami, il était caché dans l’escalier de la cave, au Gai-Moulin.

Elle ricana.

— Il prétend qu’ils n’en voulaient tous les deux qu’à la caisse. Lorsqu’ils sont entrés dans la salle, un quart d’heure environ après la fermeture, ils auraient aperçu le cadavre de Graphopoulos…

— Sans blague !

— Selon vous, qui aurait pu commettre le crime ? Attendez ! Nous nous trouvons devant un nombre restreint de coupables possibles. D’abord Genaro, le patron de la boîte. Il prétend qu’il est parti tout de suite après vous en compagnie de Victor. Il affirme que Graphopoulos était déjà sorti.

Elle haussa les épaules tandis que Chabot la regardait d’un air à la fois dur et suppliant.

— Vous ne croyez pas à la culpabilité de Genaro ni de Victor ?

— C’est idiot ! laissa-t-elle tomber avec indifférence.

— Reste le client inconnu que vous prétendez avoir accompagné quelques instants. Il a pu revenir sur ses pas, seul ou avec vous…

— Et comment serait-il entré ?

— Vous êtes depuis assez longtemps de la maison pour vous être procuré une fausse clé !

Nouveau haussement d’épaules.

— N’empêche que c’est Delfosse qui avait l’étui à cigarettes ! riposta-t-elle. Et que c’était lui qui était caché !

— C’est faux ! L’étui était chez vous, le lendemain à midi ! cria Chabot. Je l’ai vu ! Je le jure !…

Elle répéta :

— C’était Delfosse…

En un instant, il y eut une cacophonie qu’interrompit l’arrivée d’un agent, qui parla bas au commissaire.

— Faites entrer !

On vit arriver un bon bourgeois d’une cinquantaine d’année, au ventre bedonnant barré d’une épaisse chaîne de montre. Il éprouvait le besoin de prendre un air digne, voire solennel.

— On m’a demandé de passer… commença-t-il en regardant autour de lui avec étonnement.

— C’est vous, monsieur Lasnier ! intervint le commissaire. Veuillez vous asseoir. Vous m’excuserez de vous avoir dérangé, mais je voudrais savoir si, au cours de la journée d’hier, vous vous êtes aperçu qu’il manquait de l’argent dans votre tiroir-caisse.

Le chocolatier de la rue Léopold montra des yeux ronds, répéta :

— Mon tiroir-caisse ?…

Et M. Chabot père le regardait avec angoisse, comme si de sa réponse allait découler son opinion sur l’affaire.

— Je suppose que si l’on y prenait deux mille francs, par exemple, cela se remarquerait ?

— Deux mille francs ?… Vraiment, je ne comprends pas…

— Peu importe ! Répondez à ma question ! Avez-vous constaté un trou dans la caisse ?…

— Pas du tout !

— Vous avez bien reçu hier la visite de votre neveu ?

— Attendez… Oui, je crois qu’il est passé, comme cela lui arrive de temps en temps… Pas tant pour me voir que pour faire des provisions de chocolat…

— Vous n’avez jamais remarqué que votre neveu volait de l’argent dans la caisse ?

— Monsieur !

Le chocolatier s’indignait, semblait prendre les autres à témoin de l’injure qui était faite à sa famille.

— Mon beau-frère est assez riche pour donner à son fils tout ce dont il a besoin…

— Excusez-moi, monsieur Lasnier. Je vous remercie…

— C’est tout ce que vous vouliez me…

— Tout ce que je voulais vous demander, oui !

— Mais qu’est-ce qui vous fait croire ?…

— Je ne puis rien vous dire pour le moment… Girard !… Reconduisez M. Lasnier…

Et le commissaire se remit à marcher tandis qu’Adèle questionnait avec effronterie :

— On a encore besoin de moi, ici ?

Il la regarda d’une façon suffisamment éloquente pour la faire taire. Et, pendant près de dix minutes, ce fut le silence. On devait attendre quelqu’un ou quelque chose. M. Chabot n’osait pas fumer. Il n’osait pas regarder son fils. Il était aussi gêné de sa personne qu’un client pauvre dans l’antichambre d’un grand médecin.

Jean, lui, suivait le commissaire des yeux, et chaque fois que celui-ci passait près de lui il avait des velléités de lui parler.

Enfin l’on entendit des pas dans le corridor. Des coups furent frappés à la porte.

— Entrez !

Deux hommes arrivaient : Genaro, court et râblé, vêtu d’un complet clair à martingale, et Victor, que Chabot n’avait jamais vu en tenue de ville et qui, tout en noir, avait l’air d’un ecclésiastique.

— J’ai reçu votre convocation il y a une heure et… commença l’Italien avec volubilité.

— Je sais ! Je sais ! Veuillez plutôt me dire si, cette nuit, vous avez vu l’étui à cigarettes de Graphopoulos entre les mains de René Delfosse.

Genaro fit une révérence pour s’excuser.

— Personnellement, je ne m’occupe pas beaucoup des clients, mais Victor pourra vous dire…

— Parfait ! Alors, répondez, vous !

Jean Chabot regardait le garçon dans les yeux. Sa respiration était forte. Mais Victor baissa les paupières d’un air patelin, murmura :

— Je ne voudrais pas faire du tort à ces jeunes gens, qui ont toujours été très gentils envers moi. Mais je suppose que je dois dire la vérité, n’est-ce pas ?

— Répondez par oui ou par non !

— Eh bien ! oui… Il l’avait… Même que j’ai failli lui conseiller d’être prudent…

— Par exemple ! s’indigna Jean. C’est trop fort ! Vous n’avez pas honte, Victor ?… Écoutez, monsieur le commissaire…

— Silence ! Dites-moi maintenant ce que vous pensez de la situation pécuniaire de ces jeunes gens.

Et Victor, embarrassé, de soupirer, comme à regret :

— Bien sûr qu’ils me devaient toujours de l’argent… Et pas seulement le prix des consommations !… Il leur arrivait de m’emprunter des petites sommes…

— Quelle impression vous a faite Graphopoulos ?

— Un riche étranger de passage. Ce sont les meilleurs clients. Il a tout de suite commandé du champagne, sans demander le prix. Il m’a donné cinquante francs de pourboire…

— Et vous avez aperçu plusieurs billets de mille francs dans son portefeuille…

— Oui… Il était bien bourré… Surtout des billets français… Point de billets belges…

— C’est tout ce que vous avez remarqué ?

— Il avait une très belle perle à sa cravate.

— À quel moment est-il parti ?

— Un peu après Adèle, qu’accompagnait un autre client. Un gros, qui n’a bu que de la bière et qui m’a donné vingt sous de pourboire. Un Français ! Il fumait du tabac gris.

— Vous êtes resté seul avec le patron ?

— Le temps d’éteindre les lampes et de fermer la porte.

— Et vous êtes rentré directement chez vous ?

— Comme toujours ! M. Genaro m’a quitté au bas de la rue Haute-Sauvenière, où il habite.

— Le matin, en prenant votre service, vous n’avez remarqué aucun désordre dans la salle ?

— Aucun… Il n’y avait de sang nulle part… Les femmes de ménage étaient là et je les ai surveillées…

Genaro écoutait d’une oreille distraite, comme si cela ne le concernait aucunement. Le commissaire l’interpella.

— Est-il vrai que vous laissez généralement la recette de la soirée dans le tiroir-caisse ?

— Qui vous a dit cela ?

— Peu importe ! Répondez à la question.

— Pas du tout ! J’emporte l’argent avec moi, sauf la petite monnaie.

— C’est-à-dire ?

— Une moyenne de cinquante francs de pièces que je laisse dans le tiroir.

— Mais ce n’est pas vrai ! hurla littéralement Jean Chabot. Dix fois, vingt fois, je l’ai vu sortir en laissant…

Et Genaro :

— Comment ? C’est lui qui prétend que…

Il avait l’air sincèrement étonné. Il se tourna vers la jeune femme.

— Adèle vous dira.

— Bien sûr !

— Ce que je ne comprends pas, par exemple, c’est comment ces jeunes gens peuvent affirmer qu’ils ont vu le cadavre à l’intérieur de l’établissement. Graphopoulos est parti avant moi. Il n’a pas pu rentrer. Le crime a été commis dehors, je ne sais pas où… Je regrette de devoir être aussi catégorique. Ce sont des clients aussi… Et même j’avais pour eux une certaine sympathie… La meilleure preuve, c’est que je leur faisais crédit. Mais la vérité est la vérité et le cas est assez grave pour…

— Je vous remercie !

Il y eut un moment d’hésitation. Genaro questionna enfin :

— Je puis m’en aller ?

— Vous et votre garçon, oui ! Si j’ai encore besoin de vous, je vous le ferai savoir.

— Je suppose qu’il n’y a pas d’objection à ce que l’établissement reste ouvert ?

— Aucune !

Et Adèle questionna :

— Et moi ?

— Rentrez chez vous !

— Je suis libre ?

Le commissaire ne répondit pas. Il était soucieux. Il caressait avec obstination le fourneau de sa pipe. Quand les trois personnages furent dehors, on sentit le vide.

Il n’y avait plus là que le commissaire, Jean Chabot et son père. Et tout le monde se taisait.

Ce fut M. Chabot qui parla le premier. Il hésita longtemps. Enfin, il toussa, commença :

— Excusez-moi… Mais est-ce que vous croyez vraiment…

— Quoi ? répliqua l’autre, bougon.

— Je ne sais pas… Il me semble…

Et il esquissait un geste pour compléter sa pensée imprécise. Un geste imprécis qui signifiait : « Il me semble qu’il y a dans tout cela quelque chose de pas très net, de pas très clair… Quelque chose d’équivoque…»

Jean s’était levé. Il avait repris une certaine énergie. Il osa regarder son père.

— Ils mentent tous ! articula-t-il nettement. Cela, je le jure ! Est-ce que vous me croyez, monsieur le commissaire ?

Pas de réponse.

— Est-ce que tu me crois, père ?

M. Chabot commença par détourner la tête. Puis, il balbutia :

— Je ne sais pas…

Et enfin, écoutant son bon sens :

— Ce qu’il faudrait retrouver, c’est le Français dont ils parlent.

Le commissaire devait être irrésolu, car il circulait à grands pas rageurs.

— En tout cas, Delfosse a disparu ! grommela-t-il, pour lui-même plutôt que pour ses interlocuteurs.

Il marcha encore, reprit après un temps :

— Et deux témoins affirment qu’il était en possession de l’étui à cigarettes !

Il se promenait toujours, suivait sa pensée :

— Et vous étiez tous les deux dans la cave !… Et, cette nuit, vous avez essayé de jeter dans les W.-C. des billets de cent francs… Et…

Il s’arrêta, les regarda l’un après l’autre.

— Jusqu’au chocolatier qui n’admet pas qu’on lui ait volé de l’argent !

Il sortit, les laissant en tête à tête. Mais ils n’en profitèrent pas. Quand il revint, le père et le fils étaient chacun à leur place primitive, à cinq mètres l’un de l’autre, chacun enfermé dans un silence farouche.

— Tant pis ! Je viens de téléphoner au juge d’instruction ! Désormais, c’est lui qui a la haute direction de l’enquête ! Il ne veut pas entendre parler de mise en liberté provisoire. Si vous avez une faveur à demander, adressez-vous au juge de Conninck…

— François ?

— Je crois que c’est son prénom.

Et le père, à voix basse, honteuse, de murmurer :

— Nous étions au collège ensemble.

— Eh bien ! allez le voir, si vous croyez que ça serve à quelque chose. Mais j’en doute, car je le connais ! En attendant, il m’a donné l’ordre de faire conduire votre fils à la prison Saint-Léonard…

Ces mots rendirent un son sinistre. Jusque-là, il n’y avait rien de définitif.

Prison Saint-Léonard ! L’affreuse bâtisse noire enlaidissant tout un quartier, en face du Pont-Maguin, avec ses tourelles moyenâgeuses, ses meurtrières, ses barreaux de fer…

Jean, tout pâle, se taisait.

— Girard !… appela le commissaire en ouvrant une porte, prenez deux agents, la voiture…

Ces mots-là suffisaient. On attendit.

— Vous ne risquez rien à aller voir M. de Conninck ! soupira le commissaire pour dire quelque chose. Du moment que vous étiez à l’école ensemble…

Mais sa physionomie exprimait nettement sa pensée : il mesurait la différence entre le magistrat, fils de magistrats, apparenté aux plus hautes notabilités de la ville, et le comptable dont le fils avouait lui-même qu’il avait voulu cambrioler une boîte de nuit.

— C’est prêt, patron !… vint dire l’inspecteur. Est-ce qu’il faut…

Quelque chose brillait dans ses mains. Le commissaire haussa les épaules affirmativement.

Et ce fut un geste rituel, si vite fait que le père ne s’en rendit compte que quand ce fut fini. Girard avait saisi les deux mains de Jean. Un claquement d’acier.

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