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Simenon, Georges - Monsieur Gallet, décédé

Читать бесплатно Simenon, Georges - Monsieur Gallet, décédé. Жанр: Полицейский детектив издательство неизвестно, год 2004. Так же читаем полные версии (весь текст) онлайн без регистрации и SMS на сайте kniga-online.club или прочесть краткое содержание, предисловие (аннотацию), описание и ознакомиться с отзывами (комментариями) о произведении.
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» Et ce qui m’a mis sur la voie, c’est le coup de couteau… Vous saisirez tout à l’heure…

» Vous n’avez rien trouvé, je parie !… Vous ne trouverez rien, parce que c’est une histoire qu’un colonial seul peut comprendre ! Et encore ! Un colonial qui a assisté à la chose

Maigret avait déjà catalogué le contrôleur ; il savait qu’avec cette sorte d’hommes il faut prendre son mal en patience, se garder d’interrompre, approuver de la tête, ce qui est encore le seul moyen de gagner du temps !

— Un fameux luron, notre Gallet !… Il était quelque chose comme clerc de notaire chez un homme qui a fait son chemin depuis, puisqu’il est devenu sénateur… Un sportif enragé !… Ne s’est-il pas mis en tête de former une équipe de football ?… Il nous avait enrégimentés tous, de force, mais comme il n’existait pas d’autre équipe pour nous servir de partenaire… Bref !…

» Il aimait encore mieux les femmes que le football… Et, là-bas, ce ne sont pas les occasions qui manquent… Un joyeux drille !… Les tours qu’il a pu leur jouer…

» Vous permettez ?…

Il se dirigea à pas feutrés vers la porte, l’ouvrit brusquement pour s’assurer qu’il n’y avait personne derrière.

— Voilà… Une fois, il a été trop fort et je ne suis pas fier d’avoir joué, sans emballement d’ailleurs, le rôle de complice… Un planteur venait d’importer deux ou trois cents travailleurs malais… Dans le tas, il y avait des femmes et des enfants… Entre autres une petite créature qu’on eût dite taillée dans de l’ambre… Je ne sais plus son nom…

» Par contre, je me souviens que je terminais la lecture d’un bouquin de Stevenson sur les indigènes du Pacifique et que j’en avais parlé à Gallet… Il y est question d’un Blanc qui, pour s’offrir une indigène farouche, organise un mariage à la noix…

» Voilà mon Emile emballé ! En ce temps-là, les Malais ne savaient pas encore lire, surtout les pauvres types qu’on véhiculait comme des bestiaux…

» Gallet, donc, va faire sa demande au papa de la petite… Il affuble sa future belle-famille de vêtements ridicules, constitue tout un cortège qui s’amène dans une bicoque que nous avions repérée…

» Le copain qui jouait le maire est mort à l’heure qu’il est. Mais on en retrouverait d’autres qui ont participé à la farce… Car Gallet était un sacré farceur !… Il n’avait rien négligé pour que ce fût du plus haut comique…

» Les discours étaient à se rouler par terre et l’acte de mariage, qu’on remit solennellement à la gamine, loufoque d’un bout à l’autre…

» Des blagues énormes, où l’on se payait la tête de la famille, des témoins et du reste…

Le contrôleur des contributions se tut un moment, le temps de donner plus de gravité à son visage.

— Voilà ! conclut-il, Gallet a vécu avec elle comme mari et femme pendant trois ou quatre mois… Puis il est rentré en France et, bien entendu, il a laissé là sa fausse épouse…

» Nous étions encore jeunes, sinon nous n’aurions pas tant rigolé, car les Malais ne pardonnent pas…

» Vous ne les connaissez pas, commissaire… La petite a attendu longtemps le retour de son mari… J’ignore ce qui lui est arrivé par la suite, mais, quelques années après, je l’ai rencontrée, vieillie, dans un vilain quartier de Saigon…

» Quand j’ai lu le nom de Gallet dans le journal de Nevers… Remarquez que, depuis vingt-cinq ans, je ne l’ai pas revu ! Je n’ai même pas entendu parler de lui…

» Seulement ce coup de couteau, n’est-ce pas ?… Vous devinez maintenant ?… Une vengeance, c’est clair !… Ces Malais feraient le tour du monde pour se venger… Et ils ont l’habitude du poignard…

» Supposons un frère, ou même un fils de la petite… Plus civilisé… Il a commencé par se servir d’un revolver, parce que c’est pratique… Puis l’instinct a pris le dessus…

Maigret, l’œil morne, attendait, écoutant d’une oreille distraite ce verbiage qu’il était inutile d’interrompre. D’habitude, dans une affaire criminelle, il y a cent témoins du calibre du contrôleur. Si, cette fois, il ne s’en était présenté qu’un, on le devait au fait que les journaux de Paris avaient relaté le drame en quelques lignes.

— Vous y êtes, commissaire ?… Vous n’auriez pas deviné, hein ?… J’ai préféré vous demander de venir ici, car, si l’assassin savait que j’ai parlé…

— Vous disiez que Gallet jouait au football ?

— Un joueur enragé ! Et un fameux luron !… Le compagnon le plus drôle qu’on puisse trouver… Il était capable de raconter des histoires comiques pendant une soirée entière sans vous laisser reprendre haleine.

— Pourquoi a-t-il quitté l’Indochine ?

— Il disait qu’il avait son idée et qu’il n’était pas né pour vivre avec moins de cent mille francs de rente… C’était avant la guerre… Cent mille francs de rente !… Vous voyez ça !… On se moquait de lui, mais il restait sérieux comme un pape…

» — On verra ! On verra !… ricanait-il.

» Ses cent mille francs, il ne les a pas eus, pas vrai ?… Moi, ce sont les fièvres qui m’ont chassé d’Asie… Maintenant encore, j’ai mes crises… Vous prendrez bien quelque chose, commissaire ?… Je vous servirai moi-même, car j’ai envoyé la servante hors de la ville pour tout l’après-midi…

Non ! Maigret n’avait pas le courage de prendre quelque chose, ni de subir encore les naïves œillades du contrôleur lancé dans son histoire de vengeur malais !

C’est à peine s’il put remercier, sourire. Un pâle sourire de politesse !

Deux heures plus tard, il descendait du train à la gare de Tracy-Sancerre, où il avait déjà ses habitudes. Et tout en suivant le chemin qui conduit à l’Hôtel de la Loire, il soliloquait :

— Supposons que nous soyons le samedi 25 juin… Je suis, moi, Emile Gallet… La chaleur est étouffante… Mon foie me fait souffrir… Et j’ai en poche une lettre de M. Jacob qui menace de tout révéler à la police si je ne lui verse pas lundi vingt mille francs en numéraire…

» Les légitimistes ne rapportent jamais vingt mille francs à la fois… La moyenne des sommes qu’il est possible de leur soutirer oscille entre deux cents et six cents francs… Rarement mille !…

» A l’Hôtel de la Loire, je demande une chambre donnant sur la cour

» Pourquoi sur la cour ?… Est-ce parce que j’ai peur d’être assassiné ?… Par qui ?…

Il marchait tête basse, à pas lents, faisait de réels efforts pour se mettre dans la peau du mort.

— Est-ce que je sais qui est en réalité M. Jacob ?… Il y a trois ans qu’il me faisait chanter, trois ans que je paie… J’ai questionné le marchand de journaux au coin de la rue Clignancourt… J’ai suivi une jeune femme blonde qui m’a laissé en panne devant un immeuble à deux issues…

» Impossible de soupçonner Henry, dont j’ignore la liaison… Et j’ignore qu’il a déjà amassé cent mille francs, qu’il lui en faut cinq cent mille pour aller vivre dans le Midi… M. Jacob reste donc une entité terrible embusquée derrière la silhouette du vieux camelot…

Il esquissa un geste semblable à celui d’un instituteur qui, d’un coup de chiffon, efface le problème écrit sur le tableau noir.

Il eût voulu oublier toutes les données, recommencer l’enquête depuis A jusqu’à Z.

— Emile Gallet était un gai luron ! Il forçait ses camarades à former une équipe de football…

Il passa devant l’hôtel sans y entrer, sonna à la grande entrée de la propriété Saint-Hilaire. M. Tardivon, qui était sur le seuil et que Maigret n’avait pas salué, le suivait des yeux avec réprobation.

Le commissaire dut attendre assez longtemps sur la route. Enfin un valet de chambre vint lui ouvrir et Maigret demanda à brûle-pourpoint :

— Depuis quand êtes-vous dans la maison ?

— Un an… Mais… c’est M. de Saint-Hilaire que vous voulez voir ?

Celui-ci, d’une fenêtre du rez-de-chaussée, adressait un signe amical à Maigret.

— Alors ?… Cette clé ?… On l’a quand même eue !… Vous entrez un moment ?… Et l’enquête ?…

— Depuis combien de temps le jardinier est-il à votre service ?

— Trois ou quatre ans… Vous n’entrez pas ?…

Le châtelain était frappé, lui aussi, par le changement qui s’était produit chez Maigret, qui avait les traits durs, les sourcils froncés et, dans le regard, une expression inquiétante de lassitude et de méchanceté.

— Je fais monter une bouteille et…

— Qu’est devenu l’ancien jardinier ?…

— Il est bistrot, à un kilomètre d’ici, sur la route de Saint-Thibaut… Une vieille canaille, qui a fait sa pelote chez moi avant de s’installer à son compte…

— Merci…

— Vous partez ?…

— Je reviendrai…

Il disait cela comme sans y penser et, préoccupé, il regagna la poterne, s’éloigna dans la direction de la grand-route.

— Il lui fallait vingt mille francs tout de suite !… Il n’a pas cherché à se procurer cette somme chez ses victimes habituelles, c’est-à-dire chez les châtelains des environs… Il n’a rendu visite qu’à Saint-Hilaire… Deux fois dans la même journée !… Puis il a grimpé sur le mur !…

Il s’interrompit lui-même par un juron.

— Sacrebleu de sacrebleu ! Mais pourquoi, dans ce cas, a-t-il demandé une chambre donnant sur la cour ?… S’il l’avait obtenue, il n’eût pas pu monter sur le mur…

L’auberge de l’ancien jardinier se dressait près d’une écluse du canal latéral à la Loire et grouillait de mariniers.

— Un renseignement, s’il vous plaît… Police… C’est à propos du crime de Sancerre… Vous souvenez-vous d’avoir vu Emile Gallet chez votre ancien patron, dans le temps ?…

— Vous voulez parler de M. Clément ?… C’est ainsi qu’on l’appelait… Je crois bien que je l’ai vu !…

— Souvent ?…

— On ne peut pas dire… Mettons tous les six mois… Mais c’était assez pour que le singe soit de mauvais poil pendant quinze jours…

— Ses premières visites remontent loin ?

— Au moins dix ans !… Peut-être quinze !… Je vous offre un petit verre ?…

— Merci… Se sont-ils quelquefois disputés ?

— Quelquefois, non !… A chaque coup, oui !… Et même je les ai vus s’attraper comme des débardeurs…

— Et pourtant ce n’est pas Saint-Hilaire qui a tué ! ratiocinait Maigret un peu plus tard, en se dirigeant vers l’hôtel. D’abord, il n’a pas pu tirer les deux coups de feu sur Moers, puisqu’il était chez le notaire ! Ensuite, la nuit du crime, pourquoi aurait-il fait le tour par la grille ?

Il aperçut Eléonore, non loin de l’église, mais détourna la tête pour l’éviter. Il n’avait pas envie de parler, et moins à elle qu’à tout autre.

Il entendit des pas pressés derrière lui. Il la vit arriver à sa hauteur, en robe grise, les cheveux bien lissés.

— Excusez-moi, commissaire…

Il fit volte-face, la regarda dans les yeux d’une façon si hargneuse qu’elle en eut un instant la respiration coupée.

— Eh bien ?…

— Je voulais seulement savoir…

— Rien du tout ! Je ne sais rien du tout…

Et il s’éloigna sans saluer, les mains derrière le dos.

— Supposons que la chambre donnant sur la cour ait été libre… Serait-il mort quand même ?

Un gamin qui jouait au ballon vint maladroitement se jeter dans ses jambes et il le souleva de terre, le posa à un mètre de lui sans l’avoir regardé.

— De toute façon, il n’avait pas les vingt mille francs… Il ne pouvait pas les trouver pour le lundi…

» Et il n’aurait pas pu grimper sur le mur ! De ce mur, il aurait été impossible de tirer sur lui.

» Donc, il ne serait pas mort !

Il s’épongea le front, bien que la température fût beaucoup plus supportable que la semaine précédente. Il avait cette sensation crispante d’être à deux doigts du but et d’être pourtant impuissant à l’atteindre.

Des données, il en possédait en masse : cette histoire du mur, les deux coups de feu tirés huit jours plus tard dans la direction de Moers, l’affaire Jacob, les visites faites quinze ans auparavant à Saint-Hilaire, la clé perdue et retrouvée si providentiellement par le jardinier, la question des chambres, le coup de couteau achevant l’œuvre de la balle à quelques secondes d’intervalle et enfin le football et la farce du mariage…

Car la passion sportive de Gallet, ses histoires drôles et ses exploits amoureux étaient tout ce qu’il y avait à retenir du filandreux récit du contrôleur.

— Un gai luron !… Un fameux coureur…

— Vous dînerez sur la terrasse, commissaire ? questionna M. Tardivon.

Maigret était arrivé, sans le savoir.

— Cela m’est égal…

— Alors ? Cette enquête ?…

— Mettons qu’elle soit terminée…

— Hein ?… l’assassin ?…

Mais le policier passa en haussant les épaules, longea les corridors pleins d’odeurs de cuisine et pénétra dans la chambre où ses dossiers étaient toujours amoncelés sur la table, sur la cheminée et par terre.

On n’avait pas touché aux vêtements qui figuraient le mort.

Maigret se pencha, arracha le couteau planté dans le plancher et se mit à le tripoter tout en marchant de long en large.

Le ciel était couvert d’une couche de nuages d’un gris uniforme, orageux, et le mur blanc d’en face en devenait, par contraste, éblouissant.

Le commissaire allait de la fenêtre à la porte, de la porte à la fenêtre, lançait parfois un coup d’œil à la photo de la cheminée.

— Venez un moment !… articula-t-il soudain en arrivant, peut-être pour la trentième fois, à la fenêtre.

Le feuillage frémit au-dessus du mur, là où Maigret avait deviné le visage mal caché de Saint-Hilaire.

Le châtelain, dont le premier mouvement avait été un mouvement de recul, questionna d’une voix trouble, en s’efforçant de plaisanter :

— Je dois sauter ?…

— Faites le tour par la grille ! C’est plus facile…

La clé était sur la table et Maigret la lança négligemment par-dessus le mur, reprit sa promenade à travers la chambre. Il entendit la clé qui tombait dans le parc, parmi les détritus amassés à cet endroit. Puis il y eut un bruit de barrique remuée et un nouveau froissement de feuilles et de branches.

La main de Saint-Hilaire devait trembler, car la clé cliqueta longtemps sur la serrure avant qu’on perçût le grincement des gonds.

Pourtant, lorsque le propriétaire du petit château atteignit la fenêtre, il avait repris son aplomb et ce fut d’une voix enjouée qu’il prononça :

— Impossible d’échapper à votre œil de lynx !… Cette affaire me passionne tellement qu’en vous voyant rentrer j’ai eu l’idée de vous épier, afin d’en savoir aussi long que vous et de vous intriguer à notre prochaine entrevue… Je fais le tour ?…

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