Kniga-Online.club

Simenon, Georges - Maigret

Читать бесплатно Simenon, Georges - Maigret. Жанр: Полицейский детектив издательство неизвестно, год 2004. Так же читаем полные версии (весь текст) онлайн без регистрации и SMS на сайте kniga-online.club или прочесть краткое содержание, предисловие (аннотацию), описание и ознакомиться с отзывами (комментариями) о произведении.
Перейти на страницу:

« — Encore pique ! Tierce haute et belote !

« — C’est tout de même un type ! dit alors Joseph qui buvait un grog.

« Mais celui qui me caressait a toussoté avant de grogner :

« — J’aimerais autant qu’il aille moins souvent voir les roussins. Vous pigez ?

Maigret vivait la scène. Il aurait presque pu mettre un nom sur chaque visage. Que le patron du tabac tînt une maison close à Avignon, il le savait. Et le grand brun devait être le propriétaire du Cupidon, de Béziers, et d’une maison de Nîmes. Quant au nègre, il appartenait à un jazz des environs.

— Ils n’ont pas cité de nom ? demanda Maigret à Fernande, qui remuait son café.

— Pas de nom. Deux ou trois fois, ils ont dit le Notaire. J’ai pensé que c’était Cageot. Il a bien l’air d’un notaire qui a mal tourné.

« Mais attendez ! Je n’ai pas fini ! Vous n’avez pas faim ? Il devait être trois heures. On entendait les volets qu’on tirait au Floria. Mon voisin, qui me massait toujours le genou, commençait à m’énerver. C’est alors que la porte s’est ouverte et que Cageot est entré, en touchant le bord de son chapeau, mais sans dire bonjour à la ronde.

« Personne n’a levé la tête. On sentait qu’ils étaient tous à le regarder en dessous. Le patron s’est précipité derrière son comptoir.

« — Donne-moi sixvoltigeurs et une boîte de suédoises, a dit le notaire.

« Le petit Joseph ne bronchait pas. Il contemplait le fond de son grog. Cageot, lui, allumait un voltigeur, rangeait les autres dans la poche de son veston, cherchait un billet dans son portefeuille. On aurait entendu voler une mouche.

« Faut dire que le silence ne le gênait pas. Il s’est retourné, a regardé tout le monde, tranquillement, froidement, puis il a encore touché son chapeau et il est parti.

Le pyjama, tandis que Fernande trempait son pain beurré dans le café, s’était écarté et laissait voir un sein pointu.

Elle devait avoir vingt-sept ou vingt-huit ans, mais elle avait un corps de gamine, et les tétons étaient d’un rose pâle, à peine formés.

— Ils n’ont rien dit ensuite ? questionna Maigret en réglant malgré lui le réchaud à gaz sur lequel une bouilloire d’eau commençait à chanter.

— Ils se sont regardés. Ils ont échangé des œillades. Le patron a repris sa place en soupirant.

— C’est tout ?

— Joseph, qui avait l’air gêné, a expliqué :

« — Vous savez, ce n’est pas qu’il soit fier !

La rue Blanche, à cette heure, était quasi provinciale. On entendait résonner les pas des chevaux attelés à un lourd camion de brasseur.

— Les autres ont ricané, ajouta Fernande. Celui qui me pelotait la jambe a grogné :

« — Ce n’est pas qu’il soit fier, non ! Mais il est assez malin pour nous mettre tous dedans. Je vous dis que j’aimerais mieux qu’il n’aille pas tous les jours au quai des Orfèvres !

Fernande avait fait son récit en s’appliquant à ne rien oublier.

— Tu es rentrée aussitôt ?

— Ce n’était pas possible.

Cela n’eut pas l’air de faire plaisir à Maigret.

— Oh ! se hâta-t-elle d’ajouter, je ne l’ai pas ramené ici. Ces gens-là, il vaut mieux ne pas leur montrer qu’on a quelques bibelots à soi. Il ne m’a laissé partir qu’à cinq heures.

Elle se leva et alla respirer l’air frais devant la fenêtre.

— Qu’est-ce que je dois faire, maintenant ?

Maigret se promenait, préoccupé.

— Comment s’appelle-t-il, ton miché ?

— Eugène. Sur son étui à cigarettes, il y a deux initiales en or : E. B.

— Tu veux encore aller cette nuit au Tabac Fontaine ?

— Si c’est nécessaire.

— Occupe-toi surtout de celui qui s’appelle Joseph, le petit qui a alerté la police.

— Il ne faisait pas attention à moi.

— Je ne te demande pas ça. Écoute bien tout ce qu’il dit.

— Maintenant, si vous permettez, il faut que je fasse mon ménage, dit Fernande en nouant un mouchoir sur ses cheveux.

Ils se serrèrent la main. Et en descendant l’escalier, Maigret ne se doutait pas que, la nuit même, il y aurait une rafle à Montmartre, que les agents viseraient en particulier le Tabac Fontaine et qu’ils emmèneraient Fernande au Dépôt.

Cageot, lui, le savait.

— Il faut que je vous signale une demi-douzaine de femmes qui ne sont pas en règle, disait-il à la même heure au chef de la Brigade des mœurs.

Fernande surtout, qui dut prendre place dans le panier à salade !

IV

Quand on frappa à la porte, Maigret, qui venait de se raser, nettoyait son rasoir. Il était neuf heures du matin. Depuis huit heures, il était éveillé ; mais, chose qui lui arrivait rarement, il était resté longtemps au lit, à regarder les rayons obliques du soleil, à écouter les bruits de la ville.

— Entrez ! cria-t-il.

Et il but une gorgée de café froid qui stagnait au fond de sa tasse. Les pas de Philippe hésitèrent dans la chambre, gagnèrent enfin le cabinet de toilette.

— Bonjour, fiston.

— Bonjour, mon oncle.

Rien qu’à la voix, Maigret comprit que cela allait mal. Il boutonna sa chemise, leva la tête vers son neveu, qui avait les paupières rouges, les ailes du nez tuméfiées comme un enfant qui a pleuré.

— Qu’arrive-t-il ?

— On m’arrête !

Philippe disait cela sur le même ton, avec la même attitude qu’il eût annoncé : « On me fusille dans cinq minutes. »

En même temps, il tendait un journal sur lequel, en continuant de s’habiller, Maigret jeta les yeux :

« Malgré les dénégations de l’inspecteur Philippe Lauer, le juge d’instruction Gastambide aurait décidé de le mettre dès ce matin en état d’arrestation. »

— Excelsior publie ma photographie en première page, ajouta tragiquement Philippe.

Son oncle ne dit rien. Il n’y avait rien à dire. Les bretelles sur les cuisses, les pieds nus dans ses pantoufles, il allait et venait dans le soleil, à la recherche de sa pipe, puis de son tabac et enfin d’une boîte d’allumettes.

— Tu n’es pas passé là-bas ce matin ?

— J’arrive de la rue des Dames. J’ai lu le journal en prenant mon café et mon croissant boulevard des Batignolles.

C’était un matin unique. L’air était vif, le soleil joyeux, le grouillement de Paris aussi intense et aussi allègre qu’un ballet échevelé. Maigret entrouvrit la fenêtre, et la chambre vécut les mêmes pulsations que les quais, tandis qu’éclatait de lumière la lente coulée de la Seine.

— Eh bien ! il faut y aller mon garçon ! Que veux-tu que je te dise, moi ?

Il ne voulait quand même pas s’attendrir sur ce gamin qui avait renié sa fraîche vallée des Vosges pour les couloirs de la Police judiciaire !

— Bien sûr que tu ne seras pas gâté comme chez toi !

Sa mère était la sœur de Mme Maigret, c’est tout dire. Sa maison n’était pas une maison, mais une vraie couveuse : « Philippe va rentrer… Philippe aura faim… A-t-on repassé les chemises de Philippe ?… »

Et des petits plats mijotés, des crèmes, des liqueurs faites à la maison ! Et des brins de lavande dans l’armoire à linge !

— Il y a encore autre chose, dit Philippe tandis que son oncle ajustait son faux col. Cette nuit, je suis allé au Floria.

— Naturellement !

— Pourquoi naturellement ?

— Parce que je t’avais recommandé de ne pas y aller. Quelle bêtise as-tu faite ?

— Aucune. J’ai bavardé avec cette fille, Fernande, vous savez. Elle m’a laissé entendre qu’elle travaillait avec vous et qu’elle avait je ne sais quelle mission à remplir au tabac du coin de la rue de Douai. Comme je sortais, je l’ai suivie, machinalement. C’était mon chemin. Or, en quittant le tabac, elle a été apostrophée par des inspecteurs des Mœurs qui l’ont fait monter dans le panier à salade.

— Tu es intervenu, je parie !

Philippe baissa la tête.

— Que t’ont-ils répondu ?

— Qu’ils savaient bien ce qu’ils faisaient.

— File maintenant, soupira Maigret, qui cherchait sa cravate. Ne te fais pas de bile.

Il lui mit les mains sur les épaules, l’embrassa sur les deux joues et, pour couper court à la scène, feignit soudain d’être très occupé. Quand la porte se fut ouverte et refermée, seulement, il releva la tête, fit le dos rond, grommela des syllabes confuses.

Son premier soin, une fois sur les quais, fut d’acheter Excelsior à un kiosque et de regarder la photographie qui figurait, en effet, en première page avec la légende : L’inspecteur Philippe Lauer, accusé d’avoir tué Pepito Palestrino, qu’il était chargé de surveiller.

Maigret marchait lentement sur le Pont-Neuf. La veille au soir, il n’avait pas mis les pieds au Floria, mais il était allé rôder, rue des Batignolles, autour de la maison de Cageot. C’était un immeuble de rapport, vieux de cinquante ans, comme la plupart des immeubles du quartier. Le corridor et l’escalier étaient mal éclairés. On devinait des appartements tristes et sombres, des fenêtres aux rideaux sales, des meubles au velours fané.

L’appartement de Cageot était à l’entresol. À cette heure, il était vide, et Maigret avait pénétré dans la maison, comme un familier des lieux, était monté jusqu’au quatrième, puis était redescendu.

Il y avait une serrure de sûreté à la porte du Notaire, sinon le commissaire se fût peut-être laissé tenter. Lorsqu’il passa devant la loge, la concierge, qui avait le visage collé à la vitre, l’observa longuement.

Qu’est-ce que cela pouvait faire ? Maigret traversa à pied presque tout Paris, les mains dans les poches, à mâcher et remâcher les mêmes idées.

Il y avait quelque part, au Tabac Fontaine ou ailleurs, un noyau d’irréguliers qui faisaient tranquillement leurs petites affaires en marge des lois. Pepito en était. Barnabé aussi.

Et Cageot, qui était le grand patron, les supprimait ou les faisait supprimer l’un après l’autre.

Simple règlement de comptes ! La police s’en serait à peine occupée si cet animal de Philippe…

Maigret était arrivé quai des Orfèvres. Deux inspecteurs qui sortaient le saluèrent sans cacher leur étonnement, et il franchit le porche, traversa la cour, passa devant la Brigade des garnis.

Là-haut, c’était l’heure du rapport. Dans le vaste couloir, cinquante inspecteurs formaient des groupes, discutaient à voix haute, se transmettaient des renseignements et des fiches. Parfois la porte d’un bureau s’ouvrait. On criait un nom, et l’interpellé allait aux ordres.

Quand Maigret parut, il y eut quelques secondes de silence et de gêne. Mais il traversa les groupes avec tant de naturel que les inspecteurs, par contenance, reprirent aussitôt leurs conciliabules.

À droite, meublé de fauteuils de velours rouge, s’ouvrait le salon d’attente du directeur. Un seul visiteur attendait, assis dans un coin : c’était Philippe qui, le menton dans la main, regardait fixement devant lui.

Maigret s’éloigna dans la direction contraire, gagna le fond du couloir, frappa à la dernière porte.

— Entrez ! prononça-t-on à l’intérieur.

Et tout le monde le vit pénétrer, le chapeau sur la tête, dans le bureau du commissaire Amadieu.

— Bonjour, Maigret.

— Bonjour, Amadieu.

Ils se touchèrent le bout des doigts, comme jadis, quand ils se voyaient tous les matins. Amadieu fit signe à un inspecteur de sortir, puis murmura :

— Vous voulez me parler ?

D’un mouvement familier, Maigret s’assit au bord du bureau, prit des allumettes sur la table pour allumer sa pipe.

Son collègue avait reculé son fauteuil, s’était renversé en arrière.

— Ça va, à la campagne ?

— Merci. Et ici ?

— Toujours la même chose. Je dois voir le patron dans cinq minutes.

Maigret feignit de ne pas comprendre ce que ça voulait dire, déboutonna son pardessus, sans se presser. Il était là comme chez lui, et ce bureau, en effet, avait été le sien pendant dix ans.

— Vous êtes ennuyé pour votre neveu ? attaqua Amadieu, qui était incapable de se taire plus longtemps. Je tiens à vous dire que je le suis plus que vous. C’est moi qui ai pris le savon. Et vous savez que c’est allé loin. Le ministre lui-même a envoyé une note au patron. Au point que maintenant je n’ai plus rien à dire. C’est le juge d’instruction qui dirige tout. Gastambide était déjà là de votre temps, je crois ?

La sonnerie du téléphone tinta. Amadieu porta le récepteur à l’oreille, murmura :

— … Oui, monsieur le directeur… Bien, monsieur le directeur… Dans quelques minutes… Je ne suis justement pas seul… Oui… C’est cela…

Maigret connaissait l’objet de cette conversation. On venait, à l’autre bout du couloir, d’introduire Philippe chez le chef.

— Vous avez quelque chose à me demander ? fit Amadieu en se levant. Vous avez entendu. Le patron m’appelle.

— Deux ou trois petites questions. D’abord, Cageot savait-il qu’il était question d’arrêter Pepito ?

— Je ne sais pas. D’ailleurs, je ne vois pas l’importance.

— Pardon. Je connais Cageot. Je sais quel rôle il joue dans la maison. Je sais aussi que parfois on ne se cache pas des indicateurs. Est-il venu ici deux ou trois jours avant le drame ?

— Je pense. Oui, je me rappelle…

— Une autre question : connaissez-vous l’adresse de Joseph Audiat, ce garçon de café qui passait rue Fontaine juste à point pour bousculer Philippe ?

— Il couche à l’hôtel, rue Lepic, si je ne me trompe.

— Avez-vous bien vérifié l’alibi de Cageot ?

Amadieu feignit de sourire.

— Écoutez, Maigret, je connais quand même mon métier !

Ce n’était pourtant pas fini. Maigret avait repéré sur le bureau une chemise de carton jaune, à en-tête du Service des mœurs.

— C’est déjà le rapport sur l’arrestation de Fernande Bosquet ?

Amadieu regarda ailleurs, faillit peut-être s’expliquer franchement avec son interlocuteur, mais, la main sur le bouton de la porte, se contenta de murmurer enfin :

— Que voulez-vous dire ?

— Je veux dire que Cageot a fait arrêter une fille par le Service des mœurs. Où est-elle à cette heure-ci ?

— Je ne sais pas.

— Vous permettez que je jette un coup d’œil sur le dossier ?

Il était difficile de refuser. Maigret se pencha, lut quelques lignes, conclut :

— Elle doit être pour le moment à l’anthropométrie…

La sonnerie du téléphone retentit à nouveau. Amadieu fit un geste.

— Je m’excuse, mais…

— Je sais. Le patron vous attend.

Maigret boutonna son pardessus et sortit du bureau en même temps que le commissaire. Au lieu de s’engager dans l’escalier, il marcha avec lui jusqu’à la salle d’attente aux fauteuils rouges.

— Voulez-vous demander au patron s’il peut me recevoir ?

Перейти на страницу:

Simenon читать все книги автора по порядку

Simenon - все книги автора в одном месте читать по порядку полные версии на сайте онлайн библиотеки kniga-online.club.


Maigret отзывы

Отзывы читателей о книге Maigret, автор: Simenon. Читайте комментарии и мнения людей о произведении.


Уважаемые читатели и просто посетители нашей библиотеки! Просим Вас придерживаться определенных правил при комментировании литературных произведений.

  • 1. Просьба отказаться от дискриминационных высказываний. Мы защищаем право наших читателей свободно выражать свою точку зрения. Вместе с тем мы не терпим агрессии. На сайте запрещено оставлять комментарий, который содержит унизительные высказывания или призывы к насилию по отношению к отдельным лицам или группам людей на основании их расы, этнического происхождения, вероисповедания, недееспособности, пола, возраста, статуса ветерана, касты или сексуальной ориентации.
  • 2. Просьба отказаться от оскорблений, угроз и запугиваний.
  • 3. Просьба отказаться от нецензурной лексики.
  • 4. Просьба вести себя максимально корректно как по отношению к авторам, так и по отношению к другим читателям и их комментариям.

Надеемся на Ваше понимание и благоразумие. С уважением, администратор kniga-online.


Прокомментировать
Подтвердите что вы не робот:*
Подтвердите что вы не робот:*