Kniga-Online.club

Simenon, Georges - Maigret et son mort

Читать бесплатно Simenon, Georges - Maigret et son mort. Жанр: Полицейский детектив издательство неизвестно, год 2004. Так же читаем полные версии (весь текст) онлайн без регистрации и SMS на сайте kniga-online.club или прочесть краткое содержание, предисловие (аннотацию), описание и ознакомиться с отзывами (комментариями) о произведении.
Перейти на страницу:

— Commissaire Maigret.

— Pardon ! J’ignore son numéro, mais je peux vous renseigner, car il m’a invité deux ou trois fois à déjeuner. Vous connaissez Joinville ? Vous voyez l’île d’Amour, un peu plus loin que le pont ? Il n’habite pas dans l’île, mais une villa située juste en face de la pointe. Il y a un garage à bateaux devant. Vous la reconnaîtrez facilement.

Il était huit heures et demie quand le taxi s’arrêta en face de la villa. On lisait sur une plaque de marbre blanc, en lettres moulées : Le Nid, et on voyait un oiseau des îles, ou ce qui voulait être un oiseau des îles, se poser au bord d’un nid.

— Il a dû se fatiguer pour trouver ça ! remarqua Maigret en sonnant.

L’ancien patron du Cadran en effet, s’appelait Loiseau, Désiré Loiseau.

— Tu verras qu’il est du Nord et qu’il va nous offrir un vieux genièvre.

Cela ne rata pas. Ils virent d’abord une petite femme boulotte, toute blonde, toute rose, qu’il fallait regarder de près avant de distinguer les fines rides sous l’épaisse couche de poudre.

— Monsieur Loiseau !... appela-t-elle. Quelqu’un pour vous !...

C’était Mme Loiseau, pourtant. Elle les fit entrer dans le salon qui sentait le vernis.

Loiseau était gras aussi, mais grand et large, plus grand et plus large que Maigret, ce qui ne l’empêchait pas de se mouvoir avec une légèreté de danseur.

— Asseyez-vous, monsieur le commissaire. Vous aussi, monsieur ?...

— L’inspecteur Lucas.

— Tiens ! J’ai connu quelqu’un, à l’école, qui s’appelait Lucas aussi. Vous n’êtes pas Belge, inspecteur ? Moi, je le suis. Cela s’entend, n’est-ce pas ? Mais si ! Je n’en suis pas honteux, allez ! Il n’y a pas de déshonneur. Bobonne, tu nous serviras à boire...

Et ce fut le petit verre de genièvre.

— Albert ? Je crois bien que je m’en souviens. Un garçon du Nord. Je crois d’ailleurs que sa mère était Belge aussi. Je l’ai bien regretté. Voyez-vous, ce qui compte le plus, dans notre commerce, c’est la gaieté. Les gens qui vont au café aiment voir des visages souriants. Je me souviens d’un garçon, par exemple, un bien brave homme et qui avait je ne sais combien d’enfants, qui se penchait sur les clients commandant un soda, ou un quart de Vichy, ou n’importe quoi de non alcoolisé, pour leur souffler confidentiellement :

« Vous avez un ulcère aussi ?» Il vivait avec son ulcère. Il ne parlait que de son ulcère, et j’ai dû me débarrasser de lui parce que les gens changeaient de place quand ils le voyaient s’approcher de leur table.

« Albert, c’était le contraire. Un rigoleur. Il fredonnait. Il portait son chapeau avec l’air de jongler, de s’amuser, il avait une façon à lui de lancer : « Beau temps, aujourd’hui ! »

— Il vous a quitté pour se mettre à son compte ?

— Quelque part du côté de Charenton, oui.

— Il avait fait un héritage ?

— Je ne crois pas. Il m’en a parlé. Je crois seulement qu’il s’est marié.

— Au moment de vous quitter ?

— Oui. Un peu avant.

— Vous n’avez pas été invité au mariage ?

— Je l’aurais sûrement été si cela s’était passé à Paris, car, chez moi, les employés étaient comme de la famille. Mais ils sont allés faire ça en province, je ne sais plus où.

— Vous ne pouvez pas vous souvenir ?

— Non. Je vous avoue que, pour moi, tout ce qui est en dessous de la Loire, c’est le Midi.

— Vous n’avez pas connu sa femme ?

— Il est venu me la présenter un jour. Une brune, pas très jolie...

— Elle louchait ?

— Elle avait les yeux un peu de travers, oui. Mais cela n’était pas déplaisant. Il y a des gens chez qui ça choque, d’autres à qui cela ne va pas trop mal.

— Vous ne connaissiez pas son nom de jeune fille ?

— Non. Je crois me souvenir que c’était une parente, une cousine, ou quelque chose comme cela. Ils se connaissaient depuis toujours. Albert disait : « Puisqu’il faut bien finir par là un jour ou l’autre autant que ce soit avec quelqu’un qu’on connaît. » Il ne pouvait pas se passer de plaisanter. Il paraît qu’il n’avait pas son pareil pour la chansonnette, et des clients m’ont dit sérieusement qu’il pourrait gagner sa vie dans les music-halls.

« Encore un petit verre ? Vous voyez, ici, c’est calme, trop calme même, et il se pourrait qu’un jour ou l’autre je reprenne le métier. Malheureusement, on ne trouve plus beaucoup d’employés comme Albert. Vous le connaissez ? Son affaire marche ? »

Maigret préféra ne pas leur apprendre qu’Albert était mort, car il prévoyait une bonne heure de lamentations et de soupirs.

— Vous lui connaissiez des amis intimes ?

— Il était l’ami de tout le monde.

— Personne ne venait, par exemple, le chercher après son travail ?

— Non. Il fréquentait les hippodromes. Il s’arrangeait pour être libre assez souvent l’après-midi. Mais il n’était pas imprudent. Il n’a jamais essayé de m’emprunter de l’argent. Il jouait selon ses moyens. Si vous le voyez, dites-lui de ma part que...

Et Mme Loiseau, qui n’avait pas ouvert la bouche depuis l’arrivée de son mari, souriait toujours, du sourire d’une figure de cire à la vitrine d’un coiffeur.

Encore un petit verre ? Oui. Surtout que le genièvre était bon. Puis en route pour la rafle dans une rue où on ne leur sourirait plus.

CHAPITRE VI

Deux cars de la police s’étaient arrêtés rue de Rivoli, au coin de la rue Vieille-du-Temple, et pendant un moment on avait vu luire sous les réverbères les boutons argentés des agents. Ceux-ci étaient allés prendre leur poste, barrant un certain nombre de rues où se trouvaient déjà des inspecteurs de la P. J.

Puis, derrière les cars, vinrent se ranger les voitures cellulaires. Juste à l’angle de la rue du Roi-de-Sicile, un officier de paix tenait les yeux fixés sur sa montre.

Rue Saint-Antoine, des passants, inquiets, se retournaient et hâtaient le pas. Dans le quartier cerné, on voyait encore quelques fenêtres éclairées, un peu de lumière à la porte des hôtels meublés, le fanal de la maison de prostitution de la rue des Rosiers.

L’officier de paix, l’œil toujours fixé à son chronomètre, comptait les dernières secondes et, à côté de lui, un Maigret indifférent, ou un peu gêné, enfonçait les mains dans les poches de son pardessus et regardait ailleurs.

Quarante... Cinquante... Soixante... Deux coups de sifflets stridents auxquels, aussitôt, d’autres sifflets répondirent. Les agents en uniforme s’avançaient dans les rues en tirailleurs, tandis que les inspecteurs entraient dans les hôtels borgnes.

Comme toujours dans ces cas-là, des fenêtres s’ouvrirent un peu partout ; on vit dans le noir des silhouettes blanches qui se penchaient, inquiètes ou hargneuses. Déjà on entendait des voix. Déjà on voyait passer un agent qui poussait devant lui une fille, pêchée dans une encoignure, et qui lui lançait des phrases ordurières.

Il y avait aussi des pas précipités, des hommes qui essayaient de fuir, fonçaient dans l’obscurité des ruelles : en vain, car c’était pour aller se buter à d’autres cordons de police.

— Papiers !

Les lampes de poche s’allumaient, éclairaient des visages suspects, des passeports crasseux, des cartes d’identité. Il y avait, aux fenêtres, des habitués qui savaient qu’ils ne pourraient se rendormir de longtemps et qui assistaient à la rafle comme à un spectacle.

Le plus gros gibier était déjà au Dépôt. Ceux-là n’avaient pas attendu la rafle. Du moment qu’un homme avait été abattu dans le quartier en fin de l’après-midi, ils l’avaient flairée. Et, dès la nuit, des ombres s’étaient glissées le long des murs, des hommes portant de vieilles valises ou d’étranges baluchons étaient allés se heurter aux inspecteurs de Maigret.

On trouvait de tout parmi eux : un interdit de séjour, des souteneurs, de fausses cartes d’identité, comme toujours, des Polonais, des Italiens qui n’étaient pas en règle.

À tous, qui prenaient un air dégagé, la même question brutale :

— Où vas-tu ?

— Je déménage.

— Pourquoi ?

Ces yeux anxieux, ou féroces, dans l’obscurité.

— J’ai trouvé du travail.

— Où ?

Certains parlaient de rejoindre leur sœur qui habitait le Nord ou les environs de Toulouse.

— Monte toujours là-dedans !

Panier à salade. Une nuit au Dépôt, pour vérification d’identité. C’étaient de pauvres bougres, pour la plupart, mais peu d’entre eux avaient la conscience tranquille.

— Pas un Tchèque, jusqu’ici, patron ! avait-on annoncé à Maigret.

Maintenant le commissaire restait à son poste, fumant sa pipe d’un air maussade, à regarder des ombres s’agiter, à entendre des cris, des pas précipités, parfois le bruit mat d’un poing sur un visage.

C’était dans les meublés que cela remuait le plus. Les patrons passaient en hâte un pantalon, restaient, renfrognés, dans le bureau, où ils couchaient presque tous sur un lit de camp. Quelques-uns tentaient d’offrir à boire aux agents qui montaient la garde dans le corridor pendant que des inspecteurs grimpaient aux étages à pas lourds.

Dès lors, toutes les cellules puantes de la maison se mettaient à vivre d’une vie grouillante. Des coups étaient frappés à une première porte.

— Police !

Des gens en chemises, des hommes, des femmes, mal réveillés, le teint blême, avec tous, ce même air anxieux, parfois hagard.

— Vos papiers !

Pieds nus, ils allaient les chercher sous l’oreiller ou dans un tiroir, devaient parfois fouiller de vieilles malles démodées qui venaient de l’autre extrémité de l’Europe.

À l’Hôtel du Lion d’Or, un homme tout nu restait assis sur son lit, les jambes pendantes, pendant que sa compagne montrait une carte de prostituée.

— Et toi ?

Il regardait l’inspecteur sans comprendre.

— Ton passeport ?

Il ne bougeait toujours pas. Son corps paraissait d’autant plus blême qu’il était couvert de poils très noirs, très longs. Des voisins, du palier, le regardaient en riant.

— Qui est-ce ? demandait l’inspecteur à la fille.

— Je ne sais pas.

— Il ne t’a rien dit ?

— Il ne parle pas un mot de français.

— Où l’as-tu rencontré ?

— Dans la rue.

Au Dépôt ! On lui fourrait ses vêtements dans la main. On lui faisait signe de se rhabiller, et il était longtemps sans comprendre, protestait, se tournait vers sa compagne, à qui il semblait réclamer quelque chose. Son argent, sans doute ? Peut-être était-il arrivé en France le soir même, et il finirait sa première nuit quai de l’Horloge.

— Papiers...

Les portes s’entrouvraient sur des chambres délabrées, dont chacune, en plus de l’odeur de la maison, exhalait l’odeur de ses hôtes d’une semaine ou d’une nuit.

Quinze, vingt personnes se massaient devant les paniers à salade. On les poussait une à une à l’intérieur, et certaines des filles, qui avaient l’habitude, plaisantaient avec les agents. Il y en avait qui, pour s’amuser, leur adressaient des gestes obscènes.

Certains pleuraient. Des hommes serraient les poings, entre autres un adolescent très blond, le crâne rasé, qui n’avait aucun papier et sur qui on avait trouvé un revolver.

Que ce soit dans les hôtels ou dans la rue, on n’effectuait qu’un tri élémentaire. Le vrai travail se ferait au Dépôt, soit au cours de la nuit, soit le lendemain matin.

— Papiers...

Les tenanciers étaient les plus nerveux, parce qu’ils risquaient leur patente. Or, aucun n’était en règle. Chez tous on trouvait des voyageurs non inscrits.

— Vous savez, monsieur l’inspecteur, que j’ai toujours été régulier, mais, quand un client se présente à minuit et qu’on est tout endormi…

Une fenêtre s’ouvrit à l’Hôtel du Lion d’Or dont la boule laiteuse était la plus proche de Maigret. Un coup de sifflet éclata. Le commissaire s’avança, leva la tête.

— Qu’est-ce que c’est ?

Comme par hasard, un tout jeune inspecteur se trouvait là-haut et balbutiait :

— Je crois que vous devriez monter.

Maigret s’engagea dans l’escalier étroit, avec Lucas sur ses talons. Il touchait à la fois la rampe et le mur. Les marches craquaient. Il y avait des lustres, pour ne pas dire des siècles, que toutes ces maisons auraient dû être rasées, ou plutôt brûlées avec leurs nids de puces et de poux de tous les pays du monde.

C’était au second étage. Une porte était ouverte, une lampe électrique sans abat-jour, de faible voltage, avec des filaments jaunes, brûlait au bout de son fil. La chambre était déserte. Elle contenait deux lits de fer dont un seul était défait. Il y avait aussi un matelas par terre, des couvertures en mauvaise laine grise, un veston sur une chaise, un réchaud à alcool et de la mangeaille, des litres vides sur une table.

— Par ici, patron...

La porte de communication avec la chambre voisine était ouverte, et Maigret aperçut une femme couchée, un visage sur l’oreiller, deux yeux bruns, ardents, magnifiques, qui le fixaient farouchement.

— Qu’est-ce que c’est ? questionna-t-il.

Rarement il avait vu un visage aussi expressif.

Jamais il n’en avait vu de plus sauvage.

— Regardez-la bien, balbutia l’inspecteur. J’ai voulu la faire lever. Je lui ai parlé, mais elle ne s’est pas donné la peine de me répondre. Alors je me suis approché du lit. J’ai tenté de lui secouer les épaules. Voyez ma main. Elle m’a mordu jusqu’au sang.

La femme ne souriait pas en voyant l’inspecteur montrer son pouce endolori. Ses traits, au contraire, se crispaient, comme sous le coup d’une souffrance violente.

Et Maigret, qui observait le lit, fronçait les sourcils, grognait :

— Mais elle est en train d’accoucher !

Il se tourna vers Lucas.

— Téléphone pour l’ambulance. Emmène-la à la maternité. Dis au patron de monter tout de suite.

Le jeune inspecteur, à présent, rougissait, n’osait plus regarder le lit. La chasse continuait aux autres étages de la maison, et les planchers frémissaient.

— Tu ne veux pas parler ? demandait Maigret à la femme. Tu ne comprends pas le français ?

Elle le fixait toujours, et il était impossible de deviner ce qu’elle pensait. Le seul sentiment qu’exprimait son visage était une haine farouche.

Elle était jeune. Elle n’avait pas vingt-cinq ans, sans doute, et ses joues pleines étaient encadrées de cheveux longs, d’un noir soyeux. On butait dans l’escalier. Le tenancier s’arrêtait, hésitant, dans l’encadrement de la porte.

— Qui est-ce ?

— On l’appelle Maria.

— Maria qui ?

— Je ne crois pas qu’elle ait un autre nom.

Soudain Maigret fut pris d’une colère dont il eut aussitôt honte. Il ramassa un soulier d’homme, au pied du lit.

— Et ça... ? cria-t-il en le jetant dans les jambes du patron. Cela n’a pas de nom non plus ?... Et ça ?... Et ça ?...

Перейти на страницу:

Simenon читать все книги автора по порядку

Simenon - все книги автора в одном месте читать по порядку полные версии на сайте онлайн библиотеки kniga-online.club.


Maigret et son mort отзывы

Отзывы читателей о книге Maigret et son mort, автор: Simenon. Читайте комментарии и мнения людей о произведении.


Уважаемые читатели и просто посетители нашей библиотеки! Просим Вас придерживаться определенных правил при комментировании литературных произведений.

  • 1. Просьба отказаться от дискриминационных высказываний. Мы защищаем право наших читателей свободно выражать свою точку зрения. Вместе с тем мы не терпим агрессии. На сайте запрещено оставлять комментарий, который содержит унизительные высказывания или призывы к насилию по отношению к отдельным лицам или группам людей на основании их расы, этнического происхождения, вероисповедания, недееспособности, пола, возраста, статуса ветерана, касты или сексуальной ориентации.
  • 2. Просьба отказаться от оскорблений, угроз и запугиваний.
  • 3. Просьба отказаться от нецензурной лексики.
  • 4. Просьба вести себя максимально корректно как по отношению к авторам, так и по отношению к другим читателям и их комментариям.

Надеемся на Ваше понимание и благоразумие. С уважением, администратор kniga-online.


Прокомментировать
Подтвердите что вы не робот:*
Подтвердите что вы не робот:*